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Une visite à Weymouth avec John Cowper Powys [ ⇒
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LES
CARRIÈRES
La base, ou strate inférieure, de cette ≪ île ≫. remarquable est constituée d'argile de Kimmeridge...Au-dessus s'élève la grande masse solide de calcaire oolithique que nous appelons la pierre de Portland. On peut voir cette pierre n'importe où et partout sur Portland, mais là où on peut le mieux la voir, c'est sur la côte ouest, où les falaises se dressent perpendiculairement à la plage... Immédiatement en-dessous du sol superficiel commence le calcaire. Cette première strate n'est pas utilisée pour la construction, mais on l'extrait, on la casse et on la jette par-dessus le bord des falaises... Quand cette pierre de déblais a été débarrassée, une strate appelée par les carriers ≪ la couche sale ≫ est atteinte. Celle-ci constitue une remarquable formation. C'est en effet pratiquement de la terre dans laquelle sont incrustés des troncs d'arbres et de la matière végétale pétrifiée...Sous cette couche commence le calcaire oolithique que l'on utilise dans le bâtiment. Ici on remarquera que la pierre se présente en couches si régulières, chacune ayant à peu près six ou sept pieds de profondeur, qu'il semble qu'elles aient été disposées ainsi par la main humaine. Les troisièmes ou quatrième couches sont les plus appréciées. (Guide de Weymouth, Ward, Lock & Co., Ltd, vers 1930)
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Les Carrières, à l'exception de celles qui sont spécialement réservées par la Couronne, sont travaillées par des concessions avec redevances. Suite à un décret de Charles II, pendant le règne duquel les carrières commencèrent à être exploitées sur une grande échelle, neuf pence étaient prélevés sur toutes les pierres extraites sur le domaine public et versés dans un fond spécial au bénéfice des habitants, et six pence pour chaque tonne prise dans les carrières royales, mais cette dernière disposition fut annulée en 1878. On utilise la main d'oeuvre des prisonniers dans les carrières de la Couronne, mais une grande partie des habitants travaille dans les carrières privées; les carriers se lèguent le travail de père en fils, et forment une sorte de guilde entre eux, ce qui fait que l'intrusion d'étrangers appelés 'kimberlins' n'est pas du tout appréciée. (Dorset de Frank R. Heath, Methuen & Co, 1927)
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— Voilà, dit le contremaître carrier, tandis qu'il englobait le paysage d'un geste de la main, d'où est venu St Paul.
Je regardai vers la mer depuis une haute falaise sur le côté Est de Portland. Je vis une vallée creusée dans le flanc de la colline; un lieu sauvage, mort et désolé; une découpure des hautes falaises de pierre comme si une race de géants avait creusé la pierre jusqu'à son lit, exposant ainsi les racines grises et déchiquetées du rocher, maintenant recouvert ici et là d'herbe et de fleurs sauvages..
Tandis que je marchais le long des routes poussiéreuses de l'île, qui éblouissent les yeux comme la neige sous le soleil, je pensais non seulement aux bâtiments que Portland avait déjà donné à Londres, mais au Londres futur que nous n'arpenterons jamais, qui sommeille encore obscurémment dans le sein de cette Ile gravide. Il y a là une nouvelle Banque d'Angleterre. Ils l'extraieront bientôt des collines. Il y a là de nouvelles rues. J'eus l'impression bizarre que peut-être mes pas se répercuteraient dans le Londres de demain, le faisant s'éveiller de ses assoupissements préhistoriques, lui faisant ainsi faire un cauchemar pénible sur son destin.
Et je me mis à penser que jamais plus je ne regarderais Londres avec le même regard. J'aurai toujours, quelque part dans ma tête, tandis que je marcherai dans les rues de Londres, connaissance d'une île toute blanche flottant sur la mer comme une grande baleine. Quand je verrai la pierre de Portland à Londres, je penserai à la mer se brisant sur les hautes falaises; j'entendrai les cris des goélands, le roulement des galets aspirés par le ressac sur les petites plages; la poussière blanche recouvrant la route sur la petite île mystérieuse de Londres. (H.V. Morton, A la Recherche de l'Angleterre)
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